SAMAYA x PATRICK MORILLON
JOHN MUIR TRAIL : AU COEUR DU WILDERNESS AMÉRICAIN
©Photographie réalisée par Jacques André
Patrick Morillon, Jacques André, Joël Poncet et Bruno Jacoberger se sont envolés pour les parcs sauvages des Etats-Unis afin de réaliser le John Muir Trail, course mythique de 420 kilomètres traversant la Sierra Californienne du nord au sud, en totale autonomie. Pour Samaya, Patrick et Jacques reviennent sur cette aventure, riche d’émotions et de partage.
Quelle était l’essence de votre projet et comment l’avez-vous appréhendé ?
Jacques André : Nous souhaitions marcher dans les traces du célèbre John Muir, ardent promoteur des parcs nationaux et virulent défenseur de la cause amérindienne. Ce parcours, ne pouvant être entrepris qu’après avoir été tiré au sort, est reconnu pour son cadre sauvage et préservé, suivant le principe du leave no trace. Nous souhaitions également vivre une expérience entre amis de longue date et pour Patrick ayant déjà parcouru cet itinéraire en 2019, faire découvrir et partager le wilderness américain. Une fois retenus, nous avons dû présenter l’ensemble des étapes prévues, prouver nos compétences en trekking, nos conditions physique et technique, nos connaissances en gestion de la sécurité et celles théoriques et pratiques du wilderness façon US.
©Photographie réalisée par Jacques André
Patrick Morillon : Nous sommes tous les quatre professionnels de la montagne et avions déjà tous eu des expériences sur de longs parcours. Bien qu’une part d’aléas soit possible, nous nous étions préparés sérieusement afin de limiter d’éventuels déboires. Ce parcours nécessite d’être autonome sur 22 jours et 18 nuits consécutives sous tentes, dont 3 ravitaillements nous permettant d’avoir nos sacs de 70 à 80 litres à un poids respectable, d’environ 20 à 22 kilogrammes. Nous avons imaginé et quantifié nos repas et n’avions plus qu’à les acheter avant de partir à pied de Yosemite Valley. L’ensemble de l’équipement odorant pouvant attirer les ours était stocké dans nos « boîtes à ours ». Nous avions également anticipé l’isolement, car nous n’avions pas de réseau mobile sur le parcours, seulement ponctuellement sur le sommet du Mount Whitney. En plus de nos 3 panneaux solaires et 4 batteries externes, nous avions emmené deux types de balises en cas d’accident grave : une balise Spot Gen III et une balise Garmin.
©Photographie réalisée par Jacques André
Jacques André : Nous savions que nous allions rencontrer des conditions de terrain pouvant être techniques : névés raides, neige fraîche, passage à gué. Nous avons opté pour des chaussures de trek à tige haute, des mini crampons, deux mousquetons et une sangle par personne, un piolet light pour le groupe ainsi qu’une corde de 40 mètres en 4 millimètres.
Patrick Morillon : Pour notre couchage, il était impératif de détenir un matériel de qualité. Nous avons utilisé les Samaya2.5 avec vestibules, qui optimisent confort, faible poids, résistance aux éléments climatiques et faible encombrement. Nous avions tous l’habitude de dormir sous tente, de la promiscuité et nous connaissions nos caractères. Un seul bémol en forme de clin d’œil était d’être loin de nos compagnes, ce qui ne nous empêchera pas, pourtant, de repartir dans le futur.
Y avez-vous trouvé ce que vous aviez imaginé ?
Jacques André : Les conditions de terrains furent incroyables avec une météorologie excellente, malgré un épisode neigeux qui nous a permis de découvrir des traces d’ours noirs. Plus nous avancions et plus nous nous demandions si nous allions finir par tomber dessus ! Nous fûmes comblés, car la réalité fut au-delà de ce que nous avions imaginé. Nous nous sommes retrouvés dans un univers de no man’s land avec pour unique présence humaine un sentier et quelques petits cabanons de bois. Une grande diversité de paysages s’ouvrait à nous à chaque passage de col. On y voyait des lacs de toute taille et de couleurs changeantes, un concentré de roches variées où l’amateur de géologie devient enthousiaste, des forêts originelles de feuillus et conifères, travaillées par le temps, refuge immense pour une faune omniprésente.
©Photographie réalisée par Jacques André
Patrick Morillon : Beaucoup d’étapes de ce trail nous ont marqué. Pour Jojo, notre doyen de 68 ans, ce fut l’arrivée au Mount Whitney à 4417 mètres, point culminant des USA hors Alaska, où nous avons célébré avec une bonne bouteille, fidèles à nos traditions françaises. Pour Jacques, ce fut les rencontres avec une faune qui ne connaît pas la peur de l’homme, son face-à-face avec un ours noir, le clin d’œil d’un renard gris ou encore des biches s’invitant autour de notre feu de camp. Pour moi, c’était voir mes amis heureux, les yeux pétillants ou embués d’émotion à chaque pas et leur désir d’aller toujours plus loin.
Cette aventure, en plus de vous avoir marqués et touchés, a-t-elle fait naître en vous d’autres émotions, des projets futurs ?
Jacques André : Complètement. Je suis habité par la volonté de prolonger cette expérience et de repartir encore plus longtemps. Jojo, bien qu’il ait déjà bien vadrouillé dans sa vie, nous a dit explicitement que cette expérience avait de quoi changer un homme, comme un ressourcement, un beau plein d’émotion. Patrick est retourné dans la réalité quotidienne en laissant « mijoter » ce qu’il avait vécu sans trop en parler, ni même y penser. Cependant, très vite, passé le cap de la réflexion, l’appel des longs parcours sauvages est revenu.